Le Mercosur marque un point, mais la partie n’est pas finie !

Après vint-cinq ans de négociations, l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur a été signé le 6 décembre 2024 par la Présidente de la Commission européenne. Cependant, il reste encore des étapes à franchir avant une application pleine et entière de l’accord ! La résistance s’organise pour construire une minorité de blocage et empêcher la ratification de l’accord.

Pour faire aboutir l’accord malgré les oppositions, la Commission européenne pourrait proposer de scinder l’accord en deux parties :

  • un volet commercial
  • un volet « dialogue politique et coopération ».

Cette séparation permettrait de ne pas solliciter le vote des parlements nationaux pour le volet commercial. Seule l’approbation du Parlement européen et d’une majorité qualifiée d’États membres représentant au moins 65 % de la population de l’Union suffirait

Se rassembler contre le Mercosur

La France travaille donc à réunir une minorité de blocage avec au minimum quatre États représentant 35 % de la population européenne. Et la France n’est pas seule dans ce dossier. La Pologne, qui vient de prendre la Présidence du Conseil de l’Union européenne pour le premier semestre 2025, devrait être une alliée de poids dans cet objectif. Le 12 décembre dernier, au côté du Premier ministre polonais Donald Tusk, Emmanuel Macron a réaffirmé son opposition :

Très clairement, nos agricultures ne seront pas sacrifiées au fond d’un mercantilisme du siècle d’avant  »

D’autre part, les eurodéputés du Parlement européen sont très partagés sur cet accord et, là non plus, l’approbation n’est pas acquise.

Les raisons de la défiance face au Mercosur

La position de la France est constante : « cet accord n’est pas acceptable en l’état ». Deux raisons principales :

  • les enjeux environnementaux : l’accord ne respecte pas l’accord de Paris sur le climat alors que l’Europe souhaite conditionner ses futurs accords commerciaux au respect de l’accord de Paris.
  • les enjeux agricoles : l’Europe engage ses producteurs vers une montée en gamme qui se traduit par des normes nombreuses et exigeantes, ainsi que des coûts de production supplémentaires. Pourtant, cet accord autorise l’importation de produits ne respectant pas les mêmes normes de production.

Le Mercosur : des risques identifiés pour la Bretagne

Au-delà des questions sur les différences de pratiques agricoles et de normes de production, il y a l’enjeu de la quantité concernée et des débouchés visés. C’est particulièrement vrai pour la filière volaille de chair bretonne. Le choix des acteurs industriels dominants dans la région a en effet été de se spécialiser sur la production de viande à destination de la restauration hors domicile (RHD) et des produits élaborés, créneaux justement ciblés par les importations brésiliennes. C’est donc clairement une menace pour l’équilibre économique de la filière bretonne, les viandes de volaille du Mercosur étant plus compétitives.

La filière viande bovine bretonne semble relativement moins exposée. Alors que les aloyaux brésiliens visent la RHD, la production issue des élevages laitiers se destine aux produits élaborés et le troupeau allaitant approvisionne principalement les boucheries et les GMS. Le risque ne pèse donc pas directement sur les débouchés, mais plutôt sur les cotations qui pourraient diminuer en cas d’augmentation de l’offre sur le marché communautaire.

Pour aller plus loin : retrouvez des analyses d’impacts plus détaillées, avec un focus mis sur les enjeux bretons sur les intérêts défensifs (viande bovine et volaille) et les intérêts offensifs (produits laitiers et indications géographiques) de l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur.