La baisse des intrants va-t-elle participer à tempérer l’inflation alimentaire ?

Après une année 2022 record, les prix des intrants pour l’agriculture sont globalement dans un mouvement de reflux. Les risques de hausse liés aux contextes économique et géopolitique perdurent néanmoins et même se renforcent, avec l’éclatement d’un nouveau conflit au Moyen-Orient. La nouvelle mouture d’Egalim saura-t-elle protéger les agriculteurs des pressions de la distribution pour diminuer ses prix de vente ?

L’inflation globale que nous connaissons en 2023 s’explique principalement par la hausse du prix des produits alimentaires. Si l’ensemble des postes de charge de l’industrie agro-alimentaire a connu une augmentation, initiée par la reprise post-Covid et accentuée par la guerre en Ukraine, les matières premières agricoles, avec l’énergie, tiennent le haut du pavé.

Des prix d’intrants agricoles à des niveaux élevés…

Les indices Ipampa (Indice mensuel des prix d’achat des moyens de production agricole) d’août 2023, présentés ci-dessous, montrent que les intrants agricoles restent à des niveaux élevés par rapport à la période pré-inflation que nous situons avant janvier 2021.

Les prix des intrants agricoles se situent encore à un niveau élevé en août 2023 (indice général = 132,0) par rapport à la période pré-inflation (104,5 en janvier 2021) même ils ont connu une régression depuis leur maximum historique (142,0 en octobre 2022).
La tendance générale sur la période juin à août 2023 (colonne de droite) est à la décrue (), mais la remontée () de l’indice « énergie et lubrifiants » est à surveiller de près.

… en reflux pour les principales charges d’exploitation, pas pour l’énergie.

Pour les principaux postes qui concernent la Bretagne, les engrais et amendements ainsi que les aliments pour animaux sont dans une dynamique baissière entre juin et août 2023. Par rapport au mois précédent, les moyennes trimestrielles des cours des matières premières, qui donnent le ton du prix de l’aliment, reculent pour le blé (- 1,9 %), le maïs (- 3,6 %), le soja non-OGM (- 0,6 %), le colza (- 1,4 %) et le tournesol (- 0,1 %) quand le soja conventionnel augmente de 1,5 % (source Itavi). Le phénomène El Niño affectant l’hémisphère sud rend incertaine la campagne 2023/2024.
A l’inverse le poste « énergie et lubrifiants » est en hausse depuis trois mois après une année de décrue. Les décisions de réduction de la production par les pays de l’OPEP+ et la Russie, ainsi que les récents événements au Proche-Orient devraient maintenir les prix au niveau actuel pour l’année à venir selon les principales agences d’évaluation mondiales (source Prix du baril.com).

Dans les filières animales, les principales charges sont orientées à la baisse

Côté bovin lait, l’indice Ipampa connaît un recul annuel de 2,5 % en août (de 136,8 en août 2022, il passe à 133,4 en août 2023). Ce recul est lié à parts égales à la baisse des indices « Aliments achetés » (-5,3 % ; représente près d’un tiers de l’indice Ipampa Bovin Lait) et « Engrais et amendements » (-34,4 % ; 5 % de l’indice Ipampa Bovin Lait) sur un an.

Pour la filière porcine, les prix de l’aliment ont légèrement reflué en début de l’année 2023. Le prix de l’aliment charcutier Ifip avait atteint un record en juillet 2022 à 395 €/tonne et s’était maintenu à ce niveau jusqu’à la fin de 2022. Depuis, il a connu un recul annuel de 9 % en s’établissant à 358 €/tonne en juillet 2023.

En volaille, le prix de l’aliment est sur une pente descendante marquée. L’indice Itavi, qui mesure le coût de l’aliment pour les différentes espèces, s’établit à 122,7 en septembre pour le poulet, en baisse de 24,7 % par rapport à septembre 2022.

Consultez notre note de rentrée pour disposer de davantage d’éléments d’analyse sur chaque filière

Vignette note rentrée

Protéger davantage les producteurs

Les coûts de production agricole restent à des niveaux élevés et impactent nécessairement l’ensemble de la chaîne de valeur. Le consommateur supporte en partie ces augmentations de coûts. Les lois Egalim écartent des négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs le coût de la matière première agricole sur l’ensemble des produits alimentaires, dont ceux sous marques de distributeur depuis peu avec Egalim 3.

La balle est donc dans le camp de l’aval, agroalimentaire comme distribution, qui doit clore ses négociations d’ici à début janvier 2024, pour que les prix des produits alimentaires reviennent rapidement à des niveaux acceptables pour les consommateurs.

Rédigé par William Guillo

Chargé de mission Économie - Emploi, référent alimentation animale, industries agroalimentaires et commerce extérieur

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