ABC Analyse et Perspectives 2025

L’édition 2025 de l’ABC Analyse & Perspectives vient de paraître et tire un bilan de l’année 2024 qui vient de s’écouler pour l’ensemble des filières agricoles et agroalimentaires bretonnes. Ce document a pour ambition de permettre au lecteur de bien comprendre ce secteur clé de l’économie régionale et de se projeter pour les années à venir.

Un rebond des productions relatif

+1,9 %/2023 pour la collecte laitière bretonne, +2 %/2023 pour les abattages régionaux de porcs, +1,5 % pour les abattages régionaux de volailles… La production bretonne connaît un rebond inattendu en 2024, après plusieurs années à la baisse.

Toutefois la production des principales filières animales reste bien en-dessous des volumes bretons des années 2010. Par ailleurs, ce rebond a des explications conjoncturelles. En porc, ce rebond des abattages bretons est en partie la conséquence de plusieurs fermetures de sites de Bigard en Pays de la Loire et Normandie. En lait, la collecte de 2023 avait atteint un niveau particulièrement bas en raison de la tempête Ciaran et de fourrages peu lactogènes. Ce rebond ne doit pas cacher la décapitalisation des cheptels bovins, qui se poursuit en 2024, sur la même tendance que les années précédentes.

Des revenus bien orientés

Cependant, ce rebond des principales productions animales bretonnes montre aussi que le déclin n’est pas une fatalité et que la bonne santé économique des exploitations depuis 3 ans permet de soutenir cette production.

En 2024, ces revenus sont tirés par des prix toujours élevés. Bien que globalement légèrement inférieurs à 2023, les prix restent nettement supérieurs à ceux qu’ont connus les agriculteurs bretons avant 2022. C’est par exemple le cas de la cotation œuf, qui atteint les sommets depuis l’automne en raison d’un épisode d’influenza aviaire particulièrement virulent aux Etats-Unis, entrainant des tensions sur les marchés internationaux.

Les charges, elles, se stabilisent en 2024. C’est notamment le cas pour les charges alimentaires, qui ont connu un recul prononcé tout au long de l’année 2023 en raison de bonnes récoltes mondiales sur les céréales et oléoprotéagineux. Ce recul des prix est aussi la raison pour laquelle la filière grande culture bretonne connait une dynamique inverse aux autres principales filières bretonnes, pénalisée par des prix faibles et des rendements catastrophiques en 2024.

Les industries agroalimentaires fragilisées

La décapitalisation des cheptels, à l’œuvre depuis plusieurs années, fragilise les industries agroalimentaires bretonnes. C’est le cas des abattoirs, dont certains ont dû passer à la semaine de quatre jours, ce qui ne leur permet pas d’écraser leurs coûts d’investissement et de fonctionnement.

Par ailleurs, la déconsommation en volumes qui s’opère depuis 2 ans, ainsi que la descente en gamme des consommateurs, impactent les IAA. Cela se traduit en effet par un plébiscite envers les Marques de Distributeurs (MDD), ce qui oriente à la baisse les marges des industriels.

Ainsi, les investissements des IAA bretonnes ont fortement reculé en 2024 : -12,4 %/2023. Une autre conséquence est la fermeture de sites. Celui de Nutréa, spécialisé dans l’alimentation animale, à Languidic, ou encore celle, annoncée pour 2028, du site de Sodiaal à Malestroit.

Les filières qualité impactées par l’inflation

La descente en gamme des consommateurs est la résultante de la forte inflation qui s’est opérée en 2022 et 2023. Si, en 2024, l’inflation des prix alimentaire est revenu à un niveau plus habituel (+1,4 %/2023), les prix restent à des niveaux très élevés et bousculent les habitudes de consommation des Français.

Le bio est les filières de l’origine et de la qualité (les SIQO) sont particulièrement touchés par ce phénomène de descente en gamme. Les dépenses pour le bio ont diminué de 17,9 % entre 2020 et 2023, et celles pour les produits Label Rouge de 15,2 %.

Cette chute des dépenses continue de se répercuter sur tous les maillons des filières de qualité. Cela se traduit par un recul du nombre d’installations en bio (de 204 installations aidées en Bretagne en 2021, à 132 en 2024) ; par une baisse du nombre de transformateurs et par un recul des fabrications d’aliments en bio (-25 % en 3 ans). En 2024, le bio semble progressivement retrouver des couleurs, en particulier dans les magasins spécialisés. Il faudra que 2025 reste sur cette dynamique pour mettre fin à cette crise du bio et des SIQO.

Les équilibres géopolitiques au cœur des enjeux

Enfin, 2024 a été marquée par plusieurs évènements d’ordre géopolitique qui peuvent avoir des impacts sur l’économie agricole et agroalimentaire bretonne.

La Chine a lancé des enquêtes anti-dumping vis-à-vis de l’Union européenne, en réponse à la mise en place de droits de douanes sur les importations de véhicules électriques chinois. Ces enquêtes se termineront en 2025 et pourront aboutir à la mise en place de surtaxes sur les importations. Du côté de l’agroalimentaire, cela concerne déjà certains spiritueux comme le cognac, et pourrait concerner le porc, certains produits laitiers et la viande bovine. Le porc breton pourrait particulièrement être impacté par ces mesures, la région représentant à elle seule plus de 50 % des exportations françaises de porc vers la Chine. Pour les produits laitiers, en revanche, l’impact serait moindre, la dépendance bretonne à la Chine étant déjà à la baisse depuis plusieurs années.

La Chine n’est pas le seul « élément perturbateur ». Il existe aussi toujours des incertitudes sur la mise en application de l’accord du libre-échange avec le Mercosur, dont la volaille bretonne pourrait faire les frais. Par ailleurs, la volaille est aussi en concurrence directe avec les importations ukrainiennes, dont l’avenir est incertain. Enfin, et non des moindres, le retour de Donald Trump a la tête des États-Unis amène son lot de perturbations et d’incertitudes.

Plus que jamais, l’Union européenne a un rôle à jouer au milieu de ces perturbations géopolitiques, notamment à travers la Pac. La « vision » pour la Pac post-2027, proposée par le nouveau Commissaire européen à l’agriculture et à l’alimentation, Christophe Hansen, met la souveraineté alimentaire de l’UE au cœur de l’ambition européenne. A ce titre, la Bretagne à un rôle déterminant à jouer.

Retrouvez la publication et le webinaire

La publication ABC Analyse & Perspectives est consultable en cliquant ici.

La sortie de cette édition 2025 a fait l’objet d’un webinaire, dont vous pouvez retrouver le support de présentation et le replay ci-dessous.