Les Organisations de Producteurs gagnent en volume
Dans un communiqué du 2 mai, Poplait, Association d’Organisations de Producteurs (AOP) qui réunit 10 Organisations de Producteurs (OP) et représente plus de 5 000 exploitations réparties dans le Grand Ouest, dénonce la trop faible application des lois Egalim dans le cadre des négociations entre OP et industriels. Devant ce constat, l’AOP s’intéresse au sujet de la maîtrise des volumes.
Des relations parfois tendues
Nous l’avions évoqué dans un précédent article, les relations entre OP et industriels ne sont pas toujours au beau fixe. Ainsi, en début d’année 2023, trois-quarts des OP ne seraient toujours pas parvenues à signer un accord-cadre avec leur partenaire industriel. Par ailleurs, elles dénoncent régulièrement des pratiques qu’elles jugent frauduleuses : clauses de détermination du prix prévoyant de pratiquer un alignement concurrentiel, suppression des primes, etc. En particulier sont ciblés des comportements d’industriels qui choisissent de négocier en direct les contrats de gré à gré avec les éleveurs, au lieu de négocier un accord-cadre avec l’OP. Or, cette pratique est prohibée, comme l’a rappelé la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales (CEPC) dans un avis publié le 21 avril.
C’est dans ce cadre que l’AOP souhaiterait renforcer son pouvoir de négociation à travers la maîtrise de la mise en marché d’une partie de la production. Pour cela, l’AOP mettait en valeur, lors de sa dernière AG, les retours d’expériences de l’OP Triballat, et de la SAS CoLAITctif, qui ont toutes deux témoigné à cette occasion.
Des expériences concluantes
Depuis 2019, l’OP Triballat gère le surplus de collecte des producteurs adhérents de l’OP. Pour l’année 2023-24, cela devrait représenter un volume total de 1,1 million de litres, soit 4,5 % de la collecte totale. Ce lait reste collecté par Olga (nouveau nom de Triballat-Noyal), qui gère aussi les analyses. Le lait est ensuite directement vendu sur le marché spot par l’OP.
La SAS CoLAITctif est une structure qui a été montée afin de gérer la collecte des adhérents de l’OP Rolland. Créée le 1er janvier 2022, cette société est gestionnaire d’un volume annuel de 18 millions de litres, soit 50 % du volume produit par les adhérents de l’OP. Par le biais d’un contrat, l’ensemble de ce volume est collecté par la Sill, transformé en lait écrémé concentré et en crème, et revendu ensuite à Froneri (100 % des crèmes et 40 % du lait écrémé concentré), à la Sill ou sur les marchés. L’essai a été concluant seulement après trois mois d’essai : à la fin de cette période, tous les frais de dossier engagés pour le montage de la société ont été amortis et un bénéfice a été dégagé.
Une « révolution » à venir ?
Aujourd’hui, seules des OP ont monté des structures permettant de gérer une partie de leur collecte. Toutefois, il pourrait y avoir des avantages à ce qu’une AOP transversale telle que Poplait assure la coordination de cette mission. En effet, en gérant un plus grand volume de lait, une AOP pourrait diversifier son offre, ses clients, optimiser la logistique, et trouver la meilleure valorisation possible sur les marchés. Par ailleurs, la gestion de ces volumes par une AOP permettrait d’éviter des situations de concurrences qui pourraient survenir entre OP, si chacune se mettait à développer ce type de dispositif.
Il ne fait pas de doute qu’un tel projet constituerait une petite révolution et permettrait aux OP d’avoir un poids plus important lors des négociations avec les industriels, d’autant plus en période où l’offre diminue et que les industriels commencent à craindre d’en manquer. Cependant, Poplait doit avant tout obtenir le soutien de l’ensemble de ses OP adhérentes. L’AOP devra aussi s’assurer de la faisabilité juridique du projet.