Produits laitiers : pourquoi une telle différence de prix avec nos voisins européens ?

L’inflation touche tous les secteurs et tous les pays européens. Cela concerne aussi le prix du lait payé aux producteurs, qui ne cesse de croître depuis plus d’un an. Toutefois, la France fait figure d’exception avec une hausse du prix bien plus modérée qu’ailleurs en Europe. Conséquence : en septembre, la différence entre le prix du lait aux Pays-Bas et celui en France dépassait les 150 €/1 000 litres. Cet article revient sur cette particularité et donne des pistes d’explication pour comprendre ce phénomène.

Depuis un an, le prix du lait européen, tous pays confondus, n’a cessé de croître. Après une accalmie de l’inflation en janvier et février 2022, l’inflation du prix du lait s’est fortement accrue suite au déclenchement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, atteignant jusqu’à 5,3 % en comparaison annuelle sur le seul mois d’avril. Chez les principaux pays producteurs européens, la hausse des prix est entre 27 % et 36 % depuis le début de l’année, à une exception près : la France. En effet, la France fait office de retardataire avec une hausse du prix de seulement 13,5 % sur cette même période.

Plusieurs raisons peuvent expliquer cette différence d’évolution des prix entre la France et les autres pays européens. 

1ère raison : un marché intérieur moins porteur

En effet, selon l’Insee, l’inflation sur les prix à la consommation pour le beurre est de 17,4 %/2021. Une situation qui tranche avec celle constatée chez certains voisins européens. Par exemple, en Allemagne, le prix  du beurre à la consommation a augmenté de 51 % selon les données ZMB. En moyenne en septembre, l’inflation sur la catégorie « produits laitiers, fromages et œufs » est de 21,7 %/2021 en Union européenne, de 14,8 % en France (soit 12,8 % si on ne prend en compte que les produits laitiers). Cependant, le round 3 des négociations commerciales entre les transformateurs et les distributeurs semble déboucher sur une inflation qui sera plus importante cet hiver pour les consommateurs. Plusieurs annonces récentes, que ce soit du côté des distributeurs ou des IAA, vont dans ce sens.

2è raison : une part des volumes vers l’export moins importante

Selon l’Insee, les prix sortie usine des produits vendus aux GMS ont augmenté de 13 %/2021. La hausse est de 26 % lorsque le débouché est l’export. Un pays essentiellement tourné vers l’export a donc des prix de vente plus élevés dans la conjoncture actuelle. Par exemple, en France, environ 31 % de la production de poudre de lait écrémé est exporté hors Union européenne. En Pologne, les volumes exportés hors UE atteignent près de 50 % de la production totale du pays, et ce chiffre atteint même près de 75 % pour des pays comme la Belgique et les Pays-Bas.

Par ailleurs, les formules de calcul du prix payé aux producteurs qui prévalent dans les contrats des éleveurs laitiers français tendent à atténuer et à retarder la traduction dans le prix des évolutions conjoncturelles des marchés, à la hausse comme à la baisse.

C’est cette deuxième raison qui permet aux producteurs français d’avoir un impact moindre sur leur prix de vente lorsque la conjoncture mondiale n’est pas au beau fixe. C’était notamment le cas au printemps-automne 2020, période durant laquelle la demande mondiale (et notamment chinoise) a fortement chuté, alors même que la consommation intérieure a connu un bond sans précédent. Ainsi, en juillet 2020, le prix payé aux producteurs français était supérieur de près de 20 % au prix payé aux producteurs belges, et de plus de 11 % au prix payé aux producteurs allemands.

Rédigé par Olivier Carvin

Chargé de mission Economie - Emploi, référent sur la filière laitière Docteur en économie de l'agroenvironnement. Breton d'adoption. Je mets mes compétences en analyse économique au service de la filière laitière bretonne. Je suis aussi le M. Diffusion de l'équipe.

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