Reprise de Casino : quelles conséquences ?
Après plusieurs années de difficultés, l’année 2024 sera, espérons-le, celle du dénouement pour l’un des géants de la distribution, le groupe Casino. Résumé des derniers évènements et conséquences possibles de ce nouveau bouleversement dans le panorama de la grande distribution.
C’est une affaire longue et complexe : endetté à hauteur de plus de six milliards d’euros, l’ensemble du groupe Casino (qui compte six filiales dont Monoprix SAS) a été placé en procédure de sauvegarde accélérée depuis le 25 octobre 2023. Le Tribunal de commerce de Paris lui ayant octroyé deux mois supplémentaires, la procédure se prolongera jusqu’au 25 février 2024.
Le temps pour le nouveau consortium d’actionnaires, mené par le tchèque Daniel Kretinsky, de réviser son accord, se basant sur un Ebitda1 2024 revu à la baisse. Car la santé du groupe s’est en effet détériorée depuis le début des négociations. La faute, en partie, à une stratégie visant à répercuter entièrement l’inflation sur les prix en rayons, alors que ses concurrents en absorbaient une partie dans leurs marges. Les conséquences sur une baisse de la fréquentation des clients ne se sont pas faites attendre. L’Ebitda prévu pour 2024 est négatif… Et aucun résultat net positif n’est à attendre avant 2026.
Les hyper et super dans le viseur
Face à ces chiffres peu reluisants, le consortium a enjoint au groupe de se séparer très rapidement des hyper et supermarchés déficitaires. Car si Daniel Kretinsky demeure désireux de devenir actionnaire de Casino et de développer les magasins les plus rentables (comme Monoprix et Franprix), pas question pour lui d’investir davantage. 313 supermarchés et hypermarchés seraient concernés.
Outre Intermarché, Auchan intéressé
Le groupe Casino a déjà conclu avec le groupement des Mousquetaires (Intermarché) la cession de 119 hypermarchés et supermarchés. En complément, il est prévu de céder au même groupe 72 magasins supplémentaires d’ici trois ans. A noter que ces chiffres peuvent encore varier d’ici au 31 janvier, Intermarché ayant finalement mis un veto sur une vingtaine de magasins jugés non rentables.
Quant à la centaine restante, Auchan s’est montré intéressé.
En Bretagne, une dizaine de magasins sont concernés, vraisemblablement majoritairement repris par Intermarché (la liste des reprises définitives sera publiée le 31 janvier au plus tard). Les syndicats promettent d’être particulièrement vigilants sur les conditions de reprises, alors que des transferts de contrats ont déjà été annoncés.
Une incertitude sur les entrepôts
Mais qu’il s’agisse d’Intermarché ou Auchan, une problématique demeure : celle de la reprise des entrepôts. Ces derniers, qui emploient 2 000 salariés sur 12 sites, n’entreraient pas dans le cadre des négociations exclusives d’après le magazine LSA. En Bretagne, le seul site présent serait celui de Gaël, en Ille-et-Vilaine (EASYDIS GAEL).
Les conséquences d’une telle reprise
Les principales conséquences attendues se situent sans aucun doute au niveau de l’emploi local généré par les magasins ou les entrepôts eux-mêmes. Si des transferts de contrats sont attendus, des incertitudes demeurent sur les magasins les moins rentables et les entrepôts. Dans un souci de rationalisation, Auchan et Intermarché pourraient très bien préférer privilégier leurs propres outils plutôt que de racheter les infrastructures de Casino.
Mais des impacts à plus long terme peuvent également concerner les fournisseurs. Après que ceux-ci aient craint la disparition pure et simple de Casino et donc un non-paiement des factures, la reprise par d’autres groupes et l’entrée en jeu d’un consortium d’actionnaires pourraient les rassurer. Mais le paysage de la grande distribution risque d’en être durablement chamboulé. La concentration toujours plus poussée du secteur de la distribution ne place pas les transformateurs agroalimentaires en position favorable. Moins d’enseignes signifie souvent moins de latitude dans les négociations commerciales et donc une possible réduction des marges.
A noter également l’augmentation des parts de marchés attendue mécaniquement pour les groupes qui réaliseront des achats en 2024, d’après le magazine LSA :
Carrefour est concerné par le rachat du groupe Louis Delhaize pour l’été 2024. Concernant Intermarché et Auchan, c’est bien du rachat des enseignes Casino qu’ils tireront normalement bénéfice. Une remontée dans le classement qui jouera certainement dans les relations commerciales : rappelons qu’une enseigne a en effet tout à gagner en justifiant à la fois d’un plus grand parc de magasins et de parts de marché plus importante, notamment auprès des gros fournisseurs.
- le bénéfice d’une société avant que n’en soient soustraits les intérêts, les impôts sur les sociétés, les dotations aux amortissements et les provisions sur immobilisations ↩︎