La raréfaction des bovins bretons attise les convoitises
Les abattoirs bretons sont inquiets quant à leurs futurs approvisionnements en bovins. C’est ce qui ressort d’une étude réalisée par la Chambre d’agriculture de Bretagne. Des acteurs de l’aval ont été enquêtés courant de l’automne 2022 afin de répondre à la question : quelle production de viande bovine demain en Bretagne ? L’avenir du cheptel allaitant breton a plus spécifiquement été abordé.
Les pistes pour atténuer le déclin
Le contexte du marché de la viande bovine a radicalement changé ces deux-trois dernières années. La question des débouchés des animaux allaitants se posait encore récemment alors que la consommation de viande baissait et que le haché se développe continuellement. La décapitalisation bovine française, entamée il y a quelques années, change la donne en conduisant à une raréfaction de l’offre.
La production bretonne de viande bovine commence ainsi à décliner : -6 % en 2022. Ce niveau va continuer à baisser ces prochaines années, plus rapidement que la consommation d’après les acteurs du secteur. Les abatteurs sont d’ores et déjà conscients que l’approvisionnement de leurs outils est leur priorité numéro 1.
La viande issue du troupeau allaitant breton, même si elle ne représente qu’une faible part de la production régionale, ne trouvera donc pas de problème de débouchés ces prochaines années.
Comme le montre le graphique ci-dessus, la majorité de la production bretonne de viande provient des femelles laitières. Les femelles allaitantes ne représentent que 15 % de cette production. D’après les personnes enquêtées, le cheptel allaitant breton va continuer de se contracter mais sera très recherché, surtout si le cheptel laitier connaît la même évolution.
L’offre de bovins bretons et français devant chuter plus vite que la consommation, les abatteurs lancent des démarches proactives afin d’encourager la production de viande en Bretagne. Certains comptent sur la reconversion d’éleveurs laitiers dans la production de bovins allaitants. Une autre piste consiste à faire venir des animaux d’autres régions françaises pour les engraisser en Bretagne. Une autre source, potentielle, serait de pouvoir élever plus de bovins qui sont exportés vivants à l’étranger. La demande en bovins allaitants est donc bien présente mais le manque d’attrait pour cette production fait que sa contraction devrait perdurer.
Du local avant tout
Malgré le développement de la consommation de viande transformée, les bovins allaitants sont vendus de préférence en piécé car c’est mieux valorisé. Les mâles sont majoritairement exportés alors que les femelles sont destinées au marché national. Selon le type d’animaux, les abatteurs expliquent que les débouchés diffèrent selon le schéma suivant :
Les abatteurs expliquent que la première attente de leurs clients et des consommateurs est l’origine des animaux. Au minimum, les clients demandent de la viande française. La plupart des personnes interrogées constatent que le local est très en vogue. Cette demande des clients et des consommateurs arrive en tête par ordre de priorité, devant toutes autres considérations (mis à part le prix) : signes de qualité, races etc. Le local a cependant des significations différentes selon les personnes interrogées. Certains clients se satisfont de l’origine française, d’autres exigent des approvisionnements régionaux, voire encore plus locaux dans le cas de la vente directe.
Cette demande croissante de bouchers et GMS (Grandes et moyennes surfaces) pour des bovins élevés localement se fait ressentir aussi en Bretagne. Elle nécessite une adaptation de la part des abatteurs. Ceux-ci ont parfois des difficultés à répondre à ces requêtes sur certaines catégories de bovins spécifiques. Ils rapportent aussi des problèmes de qualité et de régularité. Cette évolution vers une demande de viande locale allant crescendo, les abattoirs s’organisent graduellement pour y répondre.
Des opportunités pour la viande bovine
Cette étude fait ressortir que le contexte économique est favorable à la production de viande bovine du fait de la décapitalisation. Ce qui ne signifie pas pour autant que l’élevage allaitant va rebondir car des éléments structurels lourds pèsent sur cette production : l’âge des éleveurs, la concurrence des autres productions, végétales inclues, la sociologie des jeunes installés. Néanmoins, des opportunités de meilleures valorisations et de sécurisation des marges s’ouvrent, ainsi que le développement de débouchés français, régionaux et locaux. Produire de la viande en Bretagne est un besoin des marchés. Le troupeau allaitant peut y prendre sa part, au côté d’autres schémas qui se mettent en place tels que l’engraissement de bovins croisés issus du troupeau laitier.
Cette étude est une commande des élus de la Chambre d’agriculture de Bretagne. Parmi les groupes qui ont été interrogés figurent les principaux abatteurs présents en Bretagne : SVA Jean Rozé, Bigard et Kermené. L’abattoir du Trégor, le groupement de producteurs bio Bretagne Viande Bio (BVB), ainsi que le GIE PRORALIM gérant le Label Rouge Limousin font aussi partie du panel interrogé.
Vous pouvez télécharger le rapport de l’étude en cliquant ici.