Quelles évolutions de l’élevage en Bretagne ces dix dernières années ?

Les résultats du recensement agricole (RA) 2020 sont sortis récemment. Cette vaste enquête permet de faire un état des lieux de l’agriculture en France. Elle est aussi l’occasion de mesurer les grandes évolutions de la décennie écoulée en comparant les chiffres actuels à ceux du recensement précédent de 2010.

Cet article se propose d’analyser plus spécifiquement l’évolution de l’élevage en Bretagne et de la comparer à celles des autres régions françaises. L’identité de l’agriculture bretonne est en effet profondément modelée par l’élevage. Ces dernières années, des inquiétudes se sont manifestées dans notre région quant à son avenir. Il est en effet confronté à des difficultés économiques et est très exigeant en termes de travail. La crainte est que les agriculteurs bretons se détournent de plus en plus des productions animales pour se concentrer sur des productions végétales. Est-ce que les chiffres du RA 2010 et 2020 font déjà ressortir cette tendance ? Quelle comparaison avec les autres régions ?

La Bretagne toujours première région d’élevage de France

Premier constat : avec ses 5 millions d’UGB en 2020, la Bretagne demeure de loin la première région de France d’élevage. Elle devance les Pays de la Loire qui comptent 3,5 millions d’UGB. Au total, la Bretagne rassemble 20,5 % des 24,5 millions d’UGB présents en France en 2020, les Pays de la Loire 14,4 %.

Si la Bretagne reste donc le leader en France, est-ce que son élevage a régressé cette dernière décennie ? Sur la base du nombre d’UGB, oui. En 2010, la région comptait 5,4 millions d’UGB, la perte est donc de 7,6 % en 10 ans. Les chiffres du recensement agricole confirment donc le ressenti d’un recul de l’élevage en Bretagne, mais baisse du nombre d’UGB ne signifie pas nécessairement baisse de production. La hausse des rendements laitiers permet ainsi de compenser la baisse des cheptels.

Néanmoins, 7,6 % est une baisse d’UGB substantielle. Elle est quasiment identique à celle enregistrée au niveau national puisque la France a vu son nombre total d’UGB décliner de 7,5 %. La carte ci-dessous montre les évolutions par région.

On constate que d’autres régions d’élevage connaissent des baisses plus faibles : les Pays de la Loire, mais aussi les Hauts de France et Bourgogne Franche Comté. A l’inverse, la Nouvelle Aquitaine connaît une forte baisse de 12,2 %.

Faisons maintenant ce même travail par type d’UGB.

Les bovins font de la résistance en Bretagne

Le recensement agricole comptabilise 1,9 million de bovins en 2020 en Bretagne, soit 12,2 % des 15,6 millions de bovins présents en France. Cela place notre région en 4e position derrière l’Auvergne Rhône Alpes, les Pays de la Loire et la Normandie.

Quand on compare l’évolution sur 10 ans, les chiffres du RA montrent que la Bretagne a perdu 79 000 UGB bovins, soit 4 % de ses effectifs. Au niveau national, la perte est de 1,4 million d’UGB bovins, soit un recul de 8,1 % des effectifs. Notre région résiste donc mieux qu’ailleurs en France. Seule la région PACA, qui compte très peu de bovins, recense plus de bovins en 2020 qu’en 2010.

Cet élément montre que la Bretagne a une capacité de résistance plus importante qu’ailleurs pour conserver ses bovins et suggère que l’abandon des surfaces pour faire des cultures demeure contenu. Un bémol cependant : cette période de 10 ans couvre probablement une première phase, dans la première moitié de la décennie, où les effectifs de bovins ont pu croître en Bretagne : le nombre de vaches laitières a augmenté les années précédant la fin des quotas laitiers. Nous constatons cependant que la dynamique de ces dernières années est à la baisse pour tous les effectifs. La tendance est donc négative actuellement, ce qui n’est que partiellement capturé par l’intervalle 2010 – 2020.

Chute surprenante du nombre de porcins

La Bretagne totalise 1,929 million d’UGB porcins en 2020. La comparaison des recensements 2010 et 2020 montre que notre région aurait perdu 206 000 UGB porcins en 10 ans, soit un recul de 9,6 %. Cela représente plus de la moitié des 410 000 UGB totaux que la région aurait perdu en 10 ans. Autrement dit, l’élevage porcin serait en grande partie la cause de la baisse des UGB totaux régionaux. Cette évolution est en mettre en parallèle avec la production bretonne qui, en proportion, a moins reculé sur la période : 1,303 million de tonnes en 2010 et 1,250 million de tonnes en 2020 (-4 %). Les progrès techniques ont permis en partie de compenser la baisse des cheptels.

La comparaison avec les autres régions permet par ailleurs de montrer deux choses. La première, et ce n’est pas une surprise, que la Bretagne est de très loin la région comptant le plus de porcins. La deuxième, que la baisse de ses effectifs se situe dans la moyenne nationale.

Dynamique opposée entre chair et ponte

Avec 1,142 million d’UGB volailles en 2020, la Bretagne est de loin la première région française avec 30,6 % des effectifs. Sur dix ans, leur nombre serait cependant en repli de 8,8 % alors que le nombre d’UGB volailles françaises aurait augmenté de 1,5 %. A l’inverse, les Pays de la Loire verraient leurs effectifs croître de 10 %. Un tel décalage avec la Bretagne ne se retrouve pas au niveau des chiffres de production. Ce différentiel méritera d’être examiné plus en profondeur pour être expliqué.

Dans le détail, certaines régions peu avicoles jusqu’à présent voient leurs effectifs croître surtout grâce aux poules pondeuses. Les chiffres bretons montrent aussi que le nombre d’UGB poules pondeuses a augmenté ce qui sous-entend que la filière chair a beaucoup baissé à contrario.

Quelques conclusions

Cet état des lieux réalisé à partir du recensement agricole mériterait d’être mis en perspective avec l’évolution des volumes de production, une baisse des cheptels ne signifiant pas automatiquement un recul de la production. Par ailleurs, la période de comparaison de 10 ans est intéressante mais elle peut masquer des évolutions récentes.

Ces précautions émises, il ressort de cette analyse les points suivants :

  • La Bretagne demeure de loin la première région d’élevage de France.
  • En se basant seulement sur les effectifs, ses productions animales sont toutes en recul ces dix dernières années.
  • Son élevage bovin résiste cependant mieux qu’ailleurs en France et la Bretagne reste la première région française en volaille et en porc.

Rédigé par Arnaud Haye

Chargé de mission Economie - Emploi, référent sur les filières viande bovine, porc et volailles de chair

Cet article a un commentaire

  1. Roger Hérisset

    Merci pour cette article et les nuances apportées sur les chiffres

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