Vives tensions entre acteurs de la filière laitière

Durant toute la saison estivale, des tensions se sont accumulées entre les acteurs de la filière laitière. En cause, une inflation des charges de production qui n’est pas également répercutée entre les différents maillons de la filière…

Les producteurs estiment que le prix du lait n’est pas suffisamment élevé

Dans une conférence de presse le 21 juillet, la FNPL avait promis de réaliser des manifestations si les distributeurs n’augmentaient pas le prix de la brique de lait, estimant qu’une hausse de 20 centimes sur la brique de lait permettrait une revalorisation de 40 €/1 000 litres payés aux producteurs. Finalement, dès début août, des actions ont été menées dans certains supermarchés. À l’origine de cette gronde : l’inflation ne touche pas autant les prix à la consommation que les charges qui pèsent sur l’ensemble des acteurs de la filière. Selon IRI, en juillet, l’inflation sur un an du secteur crèmerie est de 9,1 % tous circuits confondus, tandis que l’inflation des charges pesant sur les producteurs est de 22,3 %.

Des actions en GMS ont été menées par des agriculteurs dans plusieurs régions de France

En outre, la hausse du prix payé aux producteurs français est nettement inférieure à celle constatée chez les voisins européens. Alors qu’en France la hausse moyenne du prix sur un an est de 22 % (438 €/1 000 litres), elle dépasse les 40 % aux Pays-Bas (540 €/1 000 litres) et en Irlande (545 €/1 000 litres). Cette différence s’explique en partie par les stratégies de commercialisation de la production, la France valorisant une plus grande partie de sa production vers les PGC que ses voisins européens. Elle s’explique aussi par un mode de détermination du prix payé aux éleveurs qui vise à en écrêter la volatilité, à la hausse comme à la baisse : si lors des crises le prix baisse moins en France que dans les autres bassins européens, il connaît à l’inverse des envolées plus modestes lorsque les marchés sont, comme actuellement, très dynamiques. Mais cette explication ne suffit pas à apaiser les relations dans la filière. D’autant plus qu’à cela s’ajoute la décision de Sodiaal, annoncée le 20 juin, d’abandonner temporairement la formule de prix qui prévalait depuis 2018. Sur le 3e trimestre 2022, les producteurs de Sodiaal sont payés 420 €/1 000 litres, soit 20 € à 30 € moins cher que le prix pratiqué par les autres grands industriels français. Bien que Lactalis propose un prix plus élevé (en moyenne 442 €/1 000 litres), la décision de l’industriel de bloquer la formule de prix pour juillet et août a aussi provoqué la colère des OP.

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Enfin, la mise en œuvre d’Egalim 2 et la reprise des négociations commerciales qui a suivi le début du conflit Russo-Ukrainien ont engendré des tensions entre industriels et distributeurs. Notamment, dans le secteur laitier, les industriels accusent les distributeurs de ne pas répercuter suffisamment les hausses de charges, en particulier celles liées aux matières premières industrielles. C’est notamment le cas de Sodiaal, qui justifie ainsi la bascule sur une nouvelle formule de prix pour les contrats avec l’amont : « Les hausses de tarifs obtenues auprès de la grande distribution […] restent insuffisantes pour couvrir l’ensemble de nos inflations ». Les tensions se sont accumulées jusqu’au point où des industriels ont fait poindre la menace de ne pas être en capacité de fournir les distributeurs si les hausses des charges ne sont pas suffisamment prises en compte dans le 3è round des renégociations commerciales.

Rédigé par Olivier Carvin

Chargé de mission Economie - Emploi, référent sur la filière laitière Docteur en économie de l'agroenvironnement. Breton d'adoption. Je mets mes compétences en analyse économique au service de la filière laitière bretonne. Je suis aussi le M. Diffusion de l'équipe.

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