

Bio : une reprise en cours, grâce aux magasins spécialisés
Après une période de ralentissement due à l’inflation et au déréférencement du bio en grandes surfaces, la filière vit enfin un regain au premier trimestre 2025 grâce aux magasins spécialisés. Leur hausse de fréquentation et de chiffre d’affaires – presque 6 % sur le premier trimestre – prouve bien que le consommateur est prêt à revenir au bio, si tant est que l’offre soit au rendez-vous. Un constat similaire est fait en Europe, où la consommation semble repartir après trois années compliquées.
Le retour des magasins spécialisés
Après un pic de croissance entre 2015 et 2020, le marché bio en France a connu un ralentissement entre 2021 et 2023. En cause, l’inflation qui a poussé les consommateurs vers des produits moins chers, ainsi qu’une montée en puissance d’autres allégations concurrentes, telles que le « sans pesticides », ou de marques revendiquant un ancrage et une production locale pour des prix plus attractifs. Perçu à raison comme un facteur aggravant, le déréférencement des produits bio en grandes surfaces a atteint un niveau historique entre 2021 et 2024 : 25 % de l’offre jusqu’à présent proposée se sont vus retirés des rayons. Pour rappel, la GMS représente toujours le débouché majoritaire du bio, bien que ses parts de marché aient reculé durant cette période au profit des spécialistes.
Ce contexte a poussé les magasins spécialisés à faire évoluer leur stratégie, pour survivre, mais également pour profiter de ce vide laissé par les GMS. Ainsi on observe une rationalisation du parc de magasins, des travaux sur l’accessibilité prix et la fidélisation, autant de facteurs qui ont contribué à favoriser le retour des consommateurs dans leurs enseignes.
Au premier trimestre 2025, les spécialistes ont enregistré une progression de chiffre d’affaires de 5,34 %. Ceux-ci ont à la fois augmenté leur trafic (+3,09 % de tickets en plus au premier trimestre 2025 par rapport à la même période l’année précédente) et le panier moyen, de l’ordre de +2,25 %. Pour les enseignes les plus performantes, les hausses de chiffre d’affaires, qui s’accompagnent de hausses des volumes vendus, sont de +6,8 % chez Biocoop, +7,1 % chez Satoriz, +6,8 % chez Naturalia, et de +9 % chez Bio c’bon.
L’ultra frais en tête chez les spécialisés, les viandes en difficulté
En ce milieu d’année 2025, il est donc crucial de distinguer la situation chez les spécialistes du bio, qui témoignent d’une progression dans certains rayons, de celle vécue en GMS, où la reprise n’a pas encore eu lieu.
Chez les spécialistes, le rayon de l’ultra frais, essentiellement représenté par les produits laitiers, aux prix accessibles, est celui qui affiche les meilleurs résultats sur le premier semestre 2025. Il est suivi des fruits et légumes, souvent proposés à un meilleur tarif qu’en GMS. L’épicerie sucrée bio a affiché un recul en volumes, malgré une progression de chiffre d’affaires due à l’effet d’inflation (+ 4 %). L’épicerie salée a présenté un bon équilibre entre volumes et CA (+4 % dans les deux cas). Une réussite qui s’explique par des innovations dynamiques sur cette catégorie de produits, ainsi qu’une baisse de prix de certaines références comme l’huile d’olive.
En GMS, la majeure partie des rayons bio affichait une baisse des ventes au premier trimestre 2025 par rapport à la même période en 2024 d’après Circana et l’Agence Bio. Dans le détail, les ventes de viande bio y ont reculé de 3 % en volume et de 0,5 % en chiffre d’affaires, poursuivant une tendance baissière amorcée en 2021. Même constat du côté des produits laitiers (cf. tableau ci-après) et des légumes bio, avec pour ces derniers une baisse de 1,9 % des achats selon le panel Kantar. L’exception réside donc dans les œufs, qui ont vu leurs ventes progresser significativement au premier trimestre en GMS.
Évolution des ventes de produits bio en GMS
Évolution des ventes entre le 1er trimestre 2025 / 1er trimestre 2024 | En valeur | En volume |
Viandes | -0,5 % | -3 % |
Lait liquide | -4,8 % | -4,5 % |
Yaourts | -5,3 % | -4,0 % |
Beurre | -0,5 % | -2,0 % |
Oeufs | 3,5 % | +3,8 % |
Source : Circana – Agence bio
Des ventes qui dépendent de l’offre
Selon Christophe Barnouin, président d’Ecotone, plus connu pour ses marques Bjorg, Bonneterre ou Clipper, le bio est malgré tout en train de sortir de l’ornière et devrait voir ses ventes progresser de 3 à 5 % en volume sur l’ensemble de l’année 2025.
Une prédiction qui se vérifiera seulement si l’offre chez les non spécialistes, elle aussi, repart. Preuve à l’appui, l’institut Circana témoigne que dans les enseignes où l’offre bio a augmenté au premier trimestre 2025, les volumes et le chiffre d’affaires générés ont montré une tendance favorable. Dans les magasins de proximité par exemple, une augmentation de l’offre de 3,9 % par rapport au premier trimestre 2024 a engendré une hausse de CA et de volume respectivement de +2,7 % et +2,1 %.
Et les marchés bio en Europe ?
Impacté également par l’inflation, le marché européen des produits biologiques est comme en France reparti à la hausse en 2024 après le recul de 2022 et la stagnation de 2023 (voir graphique). Les principaux marchés européens — Allemagne, France, Suisse, Italie et Royaume-Uni — concentrent environ deux tiers des ventes.

(Sales revenues (billions of €) : chiffre d’affaires des ventes en milliards d’euros)
L’Allemagne reste le plus grand marché bio d’Europe, avec 17 milliards d’euros en 2024 (+5,7 %), bien que les surfaces bio (11,4 % de la SAU du pays) soient encore loin de l’objectif fixé par l’État de 30 % à l’horizon 2030.
Des pays comme l’Autriche et la Suisse tirent leur épingle du jeu en termes de parts du marché bio (respectivement 11,1 % et 11,6 %, contre 5,6 % en France).
Aux Pays‑Bas et au Royaume-Uni, la reprise se confirme : +7 % de chiffre d’affaires et volume aux Pays-Bas, et +7,3 % au Royaume-Uni, avec une progression du commerce en ligne et des magasins indépendants. Dans ces pays, la relance est portée par des motivations communes — santé, durabilité, bien‑être animal — mais la superficie agricole bio reste insuffisante face à la demande, ce qui rend les campagnes promotionnelles cruciales pour stimuler à la fois la sensibilisation et l’offre.
Rappelons que l’UE avait en effet fixé comme objectif d’atteindre 25 % des surfaces agricoles bio en 2030… Un idéal qui semble à l’heure actuelle difficile à atteindre !