Filière volaille : quand l’Europe sème la zizanie dans les filières de qualité
Lancées il y a deux ans à Bruxelles, le débat sur les normes de commercialisation inquiète la filière volaille française : si ces normes venaient à être modifiées voire supprimées, des mentions fantaisistes pourraient alors apparaitre, mettant à mal les filières de qualité. Interpellée, la Commission européenne a démenti formellement vouloir mettre en difficulté les producteurs sous labels ou mentions.
Évolution du marché
La Commission européenne invoque l’évolution du marché et les attentes des consommateurs comme principaux arguments pour justifier la révision des normes de commercialisation européennes, lesquelles sont jusqu’à présent au nombre de cinq pour l’élevage de volailles :
- Alimenté avec x % de … : dont le cahier des charges précise le pourcentage d’un certain aliment (céréales, maïs, etc.) dans la formule d’alimentation.
- Élevé à l’intérieur – système extensif : règles concernant la densité dans les bâtiments par mètre carré de surface au sol.
- Sortant à l’extérieur : règles concernant l’accès permanent de la volaille à un parcours extérieur pendant la moitié de sa vie par exemple.
- Fermier – élevé en plein air : règles concernant la densité d’occupation au mètre carré d’élevage et d’accès en permanence pendant la journée à un parcours extérieur recouvert de végétation.
- Fermier – élevé en liberté : la volaille doit avoir accès en permanence pendant toute la journée à un parcours extérieur illimité.
D’après la Commission européenne, ces normes existantes ne sont amenées ni à être supprimées, ni à être modifiées. Leur liste pourrait cependant s’allonger, notamment pour mettre en valeur les mesures en faveur du bien-être animal.
Inquiétude des professionnels
L’inquiétude a cependant été vive ces derniers jours pour les professionnels de la filière avicole. En effet, une révision de ces cinq normes pouvait laisser supposer une modification de celles-ci, ouvrant potentiellement la porte à une multiplication des qualifications des modes d’élevages. Avec pour conséquences la création de confusions supplémentaires pour le consommateur, et à terme la dégradation de l’image des mentions ou labels de qualité tel que le Label Rouge.
Nos labels de qualité n’auraient rien à craindre
La Commission européenne se veut rassurante : elle assure demeurer attentive aux cahiers des charges déjà existants, et ne pas vouloir ajouter de complexité sur les étiquettes. Notamment, nous pouvons lire site de la Commission :
Les termes “Volaille de plein vent”, “poulet à l’air libre”, “poulet des champs” ne font pas partie des discussions en cours avec les États membres. La notion de “liberté” est déjà couverte par trois des cinq indications et ne sera pas impactée : les indications impliquant un mode d’élevage en liberté ne vont pas changer.
Au-delà du débat, c’est la question de la clarté pour le consommateur qui finit toujours par se poser. Les labels sont censés faire l’objet de contrôles stricts dont les normes sont définies au niveau européen. En France, c’est l’INAO qui est garante de leur bonne application et qui s’assure de la démarche rigoureuse des producteurs pour arborer ces labels, appuyé par les certificateurs agréés.
Mais depuis plusieurs années, la multiplication des mentions ou allégations, auxquelles sont venus s’ajouter des scores (écoscore, nutriscores…), contribue à diluer les messages forts des labels officiels. Les professions doivent donc demeurer vigilantes à ce que de nouvelles normes, bien qu’encadrées, ne viennent pas affaiblir les premières. La Bretagne est particulièrement concernée, totalisant 24 signes sur son territoire en volaille de chair sur son territoire (dont 22 Labels Rouges et deux IGP) et quatre Labels Rouges en poules pondeuses. L’organisme de gestion « Fermiers d’Argoat » s’était d’ailleurs associé à l’Anvol et au Synalaf pour alerter sur les risques d’une modification de ces normes.