

Temps difficiles pour les Agences
Fusions, suppressions ou rapprochement d’opérateurs : tous les moyens sont bons pour atteindre l’objectif des 2 ou 3 milliards d’euros d’économies souhaitées par l’Etat d’ici à 2027. Les agences de développement de la filière agricole sont particulièrement ciblées.
Vers la suppression de l’Agence Bio ou de l’Inao ?
La nouvelle vient de tomber comme un couperet. Malgré les positions rassurantes du gouvernement après l’annonce de la suppression pure et simple de l’Agence Bio par le premier ministre en début d’année, le ministère de l’Agriculture a annoncé le mardi 20 mai une réduction drastique des subventions qui leur étaient allouées jusqu’à présent : 5 millions d’euros dédiés à la communication en moins (soit la totalité), 10 millions consacrés au soutien de projets dans le cadre du fonds Avenir Bio également supprimés. Avec le reliquat, soit 8,6 millions d’euros, l’Agence a déjà annoncé qu’elle serait dans l’incapacité d’assurer ses missions de promotion et de soutien de la bio en 2026.
L’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), doté d’un budget de 26 millions d’euros et de 233 agents, est également dans le viseur du gouvernement, bien qu’aucune annonce précise n’ait pour l’instant été faite concernant son avenir. Rappelons que c’est à l’INAO qu’incombe la responsabilité d’instruire les dossiers de labellisation officielle portés par les associations de producteurs et transformateurs désireux de faire reconnaitre un Label Rouge, une IGP, AOP ou STG pour leurs produits.
Alors que la Bretagne fait partie des régions avec le plus de dossiers actuellement en cours d’homologation au sein de l’institut (IGP fraise de Plougastel et échalote traditionnelle de Bretagne, AOP Gwell…), l’annonce d’une réduction des subventions ou d’une réorganisation d’ampleur risque de porter directement atteinte aux projets bretons.
Quelles perspectives pour les agences ?

Laure Verdeau, directrice de l’Agence Bio, affiche son pessimisme quant à l’avenir de la structure, dont les frais de fonctionnement s’élèvent à 2,3 millions d’euros annuels. En ponctionnant dans la trésorerie, son espérance de vie serait d’un an.
Auditionnée par le Sénat le 22 mai, elle a expliqué les conséquences de cette décision du ministère : 1 € du Fonds Avenir Bio permet de générer 1 à 3 € supplémentaire de financement public et privé (Régions, Agence de l’eau, Crédit Agricole…). En réduisant les fonds à distribuer dans le cadre du Fonds Avenir Bio, cet effet vertueux risque donc d’être suspendu et de laisser de nombreux projets sur le bord de la route.
Enfin, concernant l’impact de la suppression des 5 millions d’euros par an pour les deux ans à venir, montant consacré à la campagne de communication télévisuelle : « un marché se pilote autant par l’offre que la demande. […] En ce moment, le bio est classé en spam dans la tête des gens », alerte Laure Verdeau, qui affirme qu’il existe un lien avéré entre campagne publicitaire et hausse des ventes. Elle rappelle également la nécessité de généraliser les 20 % de bio dans les cantines afin d’assurer un débouché aux producteurs.
Pour ce qui est de l’INAO, la filière viticole, particulièrement concernée car représentant 80 % des appellations d’origine et s’appuyant sur 364 vins AOP et 75 IGP, a rapidement communiqué en alertant qu’amputer trop fortement l’INAO serait couper la jambe des appellations. Si une réforme peut sembler nécessaire, l’institut doit garder les moyens d’agir.
Vers une internalisation des agences ?
Si ce dernier n’est toujours pas fixé sur son sort, rappelons que l’idée d’une internalisation au ministère de l’agriculture, doublée d’une réduction de 20 % des crédits actuellement dédiés, avait déjà été évoquée par le député Matthias Renault (Somme) en 2024. Une mauvaise idée selon d’autres élus, qui argumentent que pour mener à bien ce genre de missions, une relation étroite avec les filières est nécessaire, chose dont l’administration ne pourrait pas se charger seule.
Ainsi, si l’Etat met essentiellement en avant les économies potentiellement réalisées, la question de l’efficacité se pose encore. Les ministères seront-ils capables d’absorber les missions des agences supprimées et d’assurer la continuité des missions ?