Négociations commerciales : vers des ajustements infra-annuels ?
Alors que les négociations commerciales s’étaient arrêtées le 1er mars dernier sur une hausse d’en moyenne 10 % des prix payés par les supermarchés aux industriels, le gouvernement tente d’inciter ces derniers à réajuster leur coût dès que possible pour limiter l’impact sur les consommateurs.
C’est une demande formulée à l’Ania (Association nationale des industries alimentaires) et à l’Ilec (représentant des industriels vendant sous marques nationales) par le ministre de l’économie Bruno Le Maire et Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée du Commerce : celle de rouvrir les négociations commerciales en vertu d’une décrue envisagée de l’inflation sur le premier semestre 2023.
Des IAA en bonne santé financière ?
Au-delà de ce retour attendu à la stabilité des prix, un rapport, publié le 13 mars par l’Inspection générale des finances, identifiait que l’Excédent Brut des Exploitation (EBE) avait rebondi pour l’agroalimentaire, effaçant les pertes subies par rapport à 2019 (soit un EBE de 18,973 milliards d’euros en 2022 contre 18,713 milliards d’euros en 2019). Un résultat qui, d’après le ministre, justifierait d’accélérer la baisse des prix de vente pour le consommateur final : 42 % des Français les plus précaires (gagnant le SMIC ou moins) auraient déjà commencé à supprimer l’équivalent d’un repas par jour d’après un sondage IFOP. Une réduction des achats qui se porterait visiblement davantage sur les produits frais, comme les fruits, les légumes ou la viande.
Des disparités entre les acteurs et des difficultés qui demeurent
L’Inspection générale des finances signale cependant que, si l’EBE global de l’agroalimentaire a augmenté en 2022 par rapport à 2019, cela cache de fortes disparités entre acteurs, dont certains se trouvent toujours en grande difficulté après deux années très perturbées. De plus, comme signalé dans le rapport, le secteur agroalimentaire n’a que très peu augmenté sa marge en 2022. Dans le détail, sur une augmentation des prix des produits d’en moyenne 17,5 % entre 2019 et 2022, 15,2 % permettent d’absorber la hausse du prix des intrants, 1,5 % les hausse de rémunération, et seulement 0,6 % concernent l’augmentation de l’EBE.
L’ABEA (Association des entreprises agroalimentaires bretonnes) rappelait d’ailleurs fin 2022 que les revalorisations tarifaires opérées jusqu’à présent avaient à peine suffit à combler les impacts de la hausse des coûts. L’année 2023 a donc démarrée, pour de nombreuses entreprises, avec cet handicap supplémentaire.
Par ailleurs, alors que le secteur agroalimentaire est toujours confronté à de nombreuses difficultés (recrutement, approvisionnement), il faut s’attendre à ce que la baisse de consommation des ménages se poursuive sur ce premier semestre 2023, voire au delà. L’OFCE indiquait mi-avril que l’indice des prix à la consommation risquait encore d’augmenter de 5,8% en 2023 et n’amorcerait une baisse qu’en 2024. Toujours d’après L’OFCE, le pouvoir d’achat pourrait reculer de 1,2 % entre 2022 et 2024.
Si réouverture des négociations il y a, il sera donc primordial de prendre en compte toutes ces variables.